LA MANUFACTURE DE CHAUVIGNY : de la faïence à la porcelaine
En 1829, Jean Bozier, « fabricant de fayence
demeurant au Marais », s’installe dans
le centre de Chauvigny ; l’aventure
de la manufacture de porcelaine
commence. Le 15 août 1908, la plus
grande partie de l’usine nouvellement
aménagée par Fernand Deshoulières, diplômé
de l’École Supérieure de Céramique de Sèvres,
est détruite par un incendie. La reconstruction est
l’occasion de bâtir de nouveaux fours et de lancer de
nouvelles productions, la Perfecta, les grès flammés, … ; à partir de
1950, les qualités de la porcelaine chauvinoise sont reconnues dans
le monde entier. En 2002, la société Deshoulières est reprise par la
Manufacture Impériale de Saint-Pétersbourg-Lomonossov.
Les débuts
Fernand Deshoulières
La reconstruction
La fabrication
L’après-guerre
APILCO
Un investissement décisif
Extension
En savoir plus
Louis Deshoulières (1830-1881)
Jean Bozier (1805-1881), « fayencier » au Maras, acquiert vers 1829 à Chauvigny, près d’une petite retenue d'eau du ruisseau « le Montauban », une maison avec un jardin.
Il continue d’agrandir cette propriété par l’achat de parcelles alentour et commence à aménager le jardin en lieu de production dès 1838 avec un four de tuilier,
puis un premier four dédié à la faïence vers 1842. C’est vers cette date que l’atelier commence à être mis en service. Au total, il y aura quatre fours (1838-1840 et 1892),
assortis chacun d’une cheminée devant dépasser d’un mètre les toitures voisines. Une vingtaine d’ouvriers sont employés à la fabrication de la faïence stannifère
(émail à base d'étain blanc et opaque qui masque la couleur rouge de la pâte) et de la poterie. En 1856, la fille de Jean Bozier, Estelle (1830-1891),
épouse son cousin germain, Louis Deshoulières (1830-1881) - voir photo - qui s’associe plus tard à son beau-père.
Fernand Deshoulières (1883-1973), à droite sur la photo
Fernand Deshoulières, diplômé de l’École Supérieure de Céramique de Sèvres, reprend la manufacture après son père, Gaston (1859-1918).
Peu à peu, il prend la décision d’abandonner la poterie culinaire et horticole, et la faïence stannifère.
En 1906, il crée une fabrication très différente d’articles culinaires à base d’un grès très fin,
produit vitrifié à mi-chemin de la faïence et de la porcelaine, qui a fait le renom d’une dizaine d’usines situées à Saint-Vallier-sur-Rhône et à Saint-Uze, dans la Drôme.
La Perfecta
L’incendie du 15 août 1908 détruit la plus grande partie de l’œuvre de Fernand Deshoulières. Une souscription de 25 000 francs (soit environ 4 000€)
vient en aide à ceux que le sinistre a réduit au chômage. Certains ouvriers sont engagés dans d’autres poteries pour la durée de la reconstruction,
comme celle de M. Marque, avenue de Bordeaux à Poitiers.
L’incendie avait épargné l’atelier de préparation de pâte ; quant aux bâtiments sinistrés, ils sont remplacés.
Dès 1909, un second four est mis en service et la nécessité d’employer des ouvriers qualifiés oblige Fernand Deshoulières à recruter dans des régions aussi diverses que le Berry,
le Limousin, la Belgique et la Suisse. La raison sociale devient « Gaston et Fernand Deshoulières » et la marque « Perfecta », porcelaine à feu, est lancée avec succès !
Cette vidéo retrace la chaîne opératoire de la fabrication de la porcelaine, de l'extraction de la terre à sa mise en caisse pour la vente.
Isolateurs en céramique
Les effets de la guerre de 1914-1918 sont ressentis à Chauvigny. Affecté au service auxiliaire du 49e Régiment d’Artillerie en raison de sa mauvaise vue,
Fernand Deshoulières s’assure le concours de M. François Devallois, ingénieur de Sèvres, et entreprend la fabrication de produits porcelaine pour l'industrie électrotechnique basse tension.
La période d’après-guerre permet un nouvel essor de l’usine. Un troisième four de 75 m3 est construit en 1919 et le dernier four à poterie est modifié en four à alandiers
pour la cuisson des grès flammés du Poitou. La poterie horticole est abandonnée peu à peu au profit de celle relevant des techniques appliquées à Limoges et dans le Berry pour la porcelaine
dure cuite à 1 400°.
La marque APILCO
La crise économique des années 30-35 est durement ressentie à Chauvigny. Durant cette même période, de nombreuses usines à Limoges et en Berry ferment leurs portes définitivement.
À Foëcy, près de Vierzon, la Société A. Pillivuyt et Fils, fondée en 1799 et jouissant à l’étranger d’une excellente réputation, cesse toute activité en 1936 et cède ses modèles
et moules à Fernand Deshoulières, qui reprend avec l’Angleterre la vente de la collection portant la marque APILCO (A. PILLIVUYT et Co). Marque qui perdure aujourd’hui.
Le four-tunnel
Dans les années 1947/48, un four-tunnel à feu continu, alimenté en gaz par deux gazogènes Sauvageot, est installé au Paradis*.
Les gazogènes, alimentés en charbon de Merlebach et en vapeur d’eau, produisaient un gaz propre à la cuisson de la porcelaine.
Ce développement majeur a permis une augmentation significative de la production.
*Nom d’origine d’une partie de l’usine du centre-ville, rue Vassalour.
Cheminée en brique de l'ancien four
En 1964, Louis Deshoulières fait rentrer son fils Yves, ingénieur diplômé des Arts et Métiers de Lille, dans la direction de l'usine qui emploie alors plus de 330 personnes. Le manque d’espace et l'ancienneté
des installations sont des raisons d'envisager un agrandissement et de sortir, pour la première fois, de l’emprise du centre-ville. Un terrain appartenant à la famille, situé au Planty en périphérie sud de Chauvigny, agrandi par l’acquisition d’une parcelle appartenant à l’Hospice,
se prête parfaitement à l’extension devenue nécessaire. Cette délocalisation est d'autant plus la bienvenue que la canalisation du gaz de Lacq, nouvellement installé à Chauvigny en 1962, passe à proximité.
Aujourd’hui, l’usine du centre-ville n’existe plus, seuls les bâtiments du Planty subsistent. Toutefois, la cheminée de briques est toujours visible à l’emplacement de l’ancienne usine.
Pour en savoir plus :
La manufacture Bozier-Deshoulières de Chauvigny (Vienne, France) — en vente à l’accueil, prix : 30 €